Le retour commence à m’aspirer, je résiste. Je repousse au dernier moment le moment de quitter la mer. Je bouleverse complètement mon programme de retour et m’apprête, une nouvelle fois, à enchaîner les détours. Le voyage s’enrichit d’amis et de trois nouveaux lieux : La Ferme culturelle du Bessin, La Carrosserie Mesnier et Le Café de la Poèterie. Au programme : Dave, Joe Dassin, Kaamelott, The Dude et Toy Story !
Installé dans un ancien corps de ferme du 18ème siècle dans le Calvados, à Esquay-sur-seulles, le Théâtre de Varemberg a été créé en 1998. Au départ, l’idée de créer une ferme théâtre, un lieu convivial et de rencontres aussi. Depuis la fin des années 90, le lieu a beaucoup évolué. Accueil d’artistes circassiens, club de jazz, restaurant, cabaret, etc., le théâtre de Varemberg a tout vu. Renommé Ferme Culturelle du Bessin en 2006 et porté par l’association du même nom, le lieu est un espace de création et de diffusion de spectacles de toutes sortes. Surtout, l’accent est donné au jeune public avec la Fête des Enfants, des spectacles et des ateliers dédiés ainsi qu’une volonté forte de sortir hors les murs. Dans la ferme résonne aussi la langue normande, dont Jean diffuse la mélodie à qui veut bien l’entendre ! Venez découvrir les témoignages de Jean et Georges (en cours de rédaction) !
La Carrosserie Mesnier est un théâtre qui existe depuis près de 30 ans ! Situé à Saint-Amand-Montrond dans le Cher, le lieu traverse les générations sans jamais perdre de sa dynamique. Au départ, un groupe de théâtre amateur animé par l’envie de créer et jouer des spectacles ensemble. Et se retrouver, tout simplement. Rapidement, l’association se développe, embauche des gens et coordonne de plus en plus d’activités : accueil de spectacles professionnels, résidences, chantiers artistiques, formations, actions culturelles dans et hors les murs, etc. La Carrosserie a gagné sa légitimité et les bases sont solides ; suffisamment pour que le collectif traverse la crise sans trop de heurts. Et les travaux en cours témoignent d’un lieu qui ne s’arrête jamais d’inventer. J’ai hâte de revenir voir un spectacle à La Carrosserie Mesnier ! Venez découvrir le témoignage de Solenne (en cours de rédaction) !
Le Café de la Poèterie est un lieu atypique situé à Saint-Sauveur-en-Puisaye dans l’Yonne. D’un coup de cœur il y a 15 ans nait un véritable village d’artistes. Sculpteurs sur métal, photographes, nombreux sont les artistes qui sont passés par l’ancienne briqueterie. Le lieu mêle dimension collective et projets privés. L’association Tétrapop gère le café, les concerts, l’organisation de la fête de l’Art. Elle accueille enfin un tremplin permettant à de jeunes artistes de se mettre en avant. Le lieu accueille aussi des résidences, des stages et propose à la location ateliers et hébergement. Un studio d’enregistrement est aussi dans les murs. De plus en plus, l’association se tourne vers l’extérieur et les habitants. Le Café fait partie du paysage et on y croise tous les âges et tous les genres. Et bientôt, une nouvelle salle de spectacle qui promet de donner au lieu une nouvelle dimension ! Venez découvrir le témoignage de Laurène (en cours de rédaction) !
Une question de choix
« Entre les deux / Ma vie balance / Amour ou liberté / Je dois saisir ma chance / Mais jusqu'à ce jour / Je n'ai rien décidé » (Dave)
Les prises de décisions n’ont jamais été mon fort. Déjà petit, j’étais incapable de choisir entre mes Lego et mes Playmobil. Et ça me mettait dans des états de stress pas possible. Si bien que, finalement, je ne faisais rien et pleurais tout mon ennui auprès de ma mère. Plus tard, ça n’a pas tellement changé. En randonnée notamment, il m’est arrivé plusieurs fois de me retrouver planté devant une intersection à analyser les pour et les contre de chacune des options. Et quand, après de longues minutes, je me décidais enfin, je regrettais mon choix tout le long du sentier. Si bien que je finissais souvent par faire demi-tour… et par ruminer tout mon soûl de n’avoir pas été au bout de ma décision initiale. L’horreur. Pour parer ces moments de prise de tête absolus, j’en étais arrivé, de façon souvent inconsciente, à reporter la responsabilité du choix sur les autres ; en particulier les femmes avec qui j’ai partagé ma vie. Et si l’option qu’elles avaient prise ne me convenait pas, je les blâmais et me flagellais de ne pas avoir réussi à décider de moi-même. Atroce. Mais le plus bizarre, c’est que ce handicap ne concerne quasiment que des choix du quotidien. Etrangement, j’ai ainsi beaucoup moins de mal à prendre des décisions susceptibles d’impacter ma vie sur le moyen ou le long-terme. Et je ne sais absolument pas ce que tout ça veut bien pouvoir dire.
Ce voyage constituait donc pour moi une épreuve en continu. Mon itinéraire, bien que tiré au cordeau, a subi, face aux aléas, de nombreuses modifications. Et avec un peu de recul, je suis vraiment heureux de constater que j’ai toujours réussi à m’adapter. Bien sûr, il y a eu des moments de flottement. Bien sûr, il m’est arrivé de m’arracher les cheveux. Mais ce n’était rien en comparaison de ce que je vivais jusqu’alors. Et surtout, quels qu’aient été mes choix, je ne les ai jamais regrettés. C’est donc dans cet état d’esprit que je prépare l’itinéraire du retour. J’ai un seul impératif : rejoindre des amis le 17 septembre dans le Morvan pour un weekend prévu de longue date. Pour le reste, tout est possible, tout est modifiable. Alors qu’il était initialement prévu que je rejoigne la région du Puisaye (Yonne) le 6 septembre, pour découvrir le Café de la Poèterie, je rallonge mon programme de cinq étapes et de deux tiers-lieux supplémentaires. Toujours plus Nicolas Debaive… Les voici donc résumées ci-après :
Cousinade
« Toute la vie sera pareille à ce matin / Aux couleurs de l'été indien » (Joe Dassin)
Mes cousins, Anne et Christopher, habitent à proximité de Vannes, aux portes du Morbihan. Pour les rejoindre, j’ai longé la Bretagne sud et me suis notamment arrêté une nuit à l’Anse de Rospico, à proximité de Pont-Aven. La petite plage surélevée est entourée de falaises rocheuses. A son extrémité ouest, la mer s’infiltre dans les terres et vient former une grande bassine. A marée haute, quelques mètres dans l’eau suffisent à perdre pied. Mes dernières baignades en Bretagne, mes derniers soleils aussi. A partir de demain, la météo annonce la fin de l’été indien. Christopher et moi arrivons au même moment devant la petite maison dans la banlieue résidentielle où ils ont élu domicile depuis un peu plus d’un an. Le compagnon de ma cousine est probablement l’une des personnes les plus prévenantes que je connaisse. Toujours souriant, toujours les bons mots, toujours de bonne compagnie ; il aura même été jusqu’à suspendre mon linge ! Une vraie crème. Il est comme ça Christopher. Anne nous rejoint quelques minutes plus tard. Je suis content de retrouver ma cousine et elle est heureuse de me voir. Nous avons longtemps été éloignés et nous profitons de ces moments de passage pour rattraper le temps. Anne est aussi extrêmement bienveillante et je me sens chez moi. Leurs deux filles, au départ un peu timides, se font peu à peu à ma présence et, rapidement, je deviens leur meilleur copain. De manière générale, je ne suis pas trop famille. Mais si je mène ma vie de manière indépendante depuis pas mal d’année maintenant, ces moments partagés sont un lien que je ne couperai pour rien au monde.
Brocéliande
« Je crois qu’il faut que vous arrêtiez d’essayer de dire des trucs » (Arthur)
Pour rejoindre le Cotentin, ma dernière étape de l’ouest, je décide de faire un petit détour par la Forêt de Brocéliande, où la légende du Roi Arthur prend sa source. Mythique et enchantée, sa localisation a longtemps fait l’objet de recherches et de débats. De nos jours, il semble néanmoins admis que les récits pointent vers la Forêt de Paimpont, située au sud-ouest de Rennes. Aujourd’hui, le temps est mitigé et on s’attend autant à prendre des coups de soleil qu’à recevoir une douche. Je m’équipe donc en conséquence avant de partir retrouver Merlin, Lancelot et consorts. Nous sommes le 8 septembre, en pleine semaine. Les vacances d’été terminées, je m’attends à randonner relativement seul. Quelle ne fut pas ma surprise quand je découvre que le parking du Val sans retour est plein à craquer ! Arrivés aux abords de la forêt, des hordes de touristes se massent devant l’Arbre d’Or. Une œuvre d’art qui n’a rien à voir avec les légendes arthuriennes mais qui, depuis les années 90, est rentrée dans la culture populaire. Je tente de m’extraire de la foule et décide de suivre un itinéraire boueux à travers la forêt. Sur les abords du chemin, le ruisseau du Gué de Mony sort parfois de son lit, m’obligeant à escalader les berges formées par ses divagations. Sur les hauteurs, changement de paysage. La lande s’installe sur des dalles pourprées, des schistes rouges affleurant sur les crêtes du Massif de Paimpont. Je peux comprendre qu’on trouve dans ce lieu une forme de féérie mais je suis bien trop pragmatique pour me laisser impressionner. La forêt que je traverse est une chênaie acidiphile relativement banale et je ne suis pas particulièrement sensibles aux paysages de landes. A Tréhorenteuc, la seule église du monde consacrée à la légende du Graal est remplie de monde. Une femme se tient au bout de la nef, derrière l’autel, les jambes en croix. Elle semble être entrée dans une sorte d’état méditatif. A l’autre extrémité, un endroit précis semble retenir l’attention d’un groupe. Une énergie particulière s’en dégagerait. Je ne ressens pour ma part qu’un léger courant d’air sur mes chevilles. Beaucoup trop pragmatique.
Séverine, à cœur ouvert
Le lendemain, je rejoins Lessay sur la bordure ouest du Cotentin. A mon arrivée, des panneaux indiquent que la route est coupée. La Foire de Sainte Croix, l’une des plus importantes foires agricoles, bat son plein. En temps normal, l’événement accueille jusqu’à 350 000 personnes sur trois jours ! Je n’aurais pas l’occasion de m’y immerger et puis la compagnie de Séverine et la visite de la Réserve Naturelle Nationale de la Tourbière de Mathon m’attirent bien davantage. Séverine est l’une des personnes avec qui je suis me suis immédiatement entendu lors de mon premier congrès des réserves naturelles, en 2009. Très vite, elle m’a intégré au sein de l’Ephemera Orchestra, le groupe du réseau. Depuis, notre relation s’est étoffée et elle fait partie des personnes pour lesquelles je n’ai aucune difficulté à faire un détour. La réserve naturelle, assez petite, recouvre néanmoins de nombreux types d’habitats : landes, tourbière acide, aulnaie, chênaie, etc. Cet assortiment résulte en une grande richesse floristique qui fait la réputation de la réserve. Mais, malgré les efforts de Séverine, savoir qu’on y trouve de la grande douve ou de l’andromède ne me fait pas grand-chose. Je ne sais mettre de noms que sur les arbres et quelques champignons. Au moment de partir le lendemain, je me rends compte à quel point cette étape m’aura fait du bien. Même si je suis un livre ouvert, rares sont les personnes auprès desquelles je me livre à cœur ouvert. Séverine fait partie de ces personnes de confiance et, s’étant aussi livrée elle-même, je ressens que c’est réciproque. Et puis, je repars avec un panier de produits régionaux, comme un écho à la mythique soirée du congrès des réserves naturelles. Merci Séverine.
La Ferme culturelle du Bessin
« There’s nothing else to do here but die » (Il faut sauver le soldat Ryan)
Bien que j’aie déjà visité suffisamment de lieux pour me faire mon idée, je décide de rajouter à mon itinéraire la Ferme Culturelle du Bessin, située au nord de la presqu’ile, à l’ouest de Caen. Recommandé par la compagne de Jérémy, retrouvé dans les Pyrénées catalanes, le lieu est aussi connu de Séverine, bien qu’elle n’y soit pas retournée depuis quelques années. Au téléphone, Jean m’avait suggéré de passer en fin de semaine, au moment de l’ouverture du bar. – « Si tu veux voir de l’activité, c’est là qu’il faut passer ». Je gare le van devant une vieille boulangerie, l’une des dépendances de la vieille ferme familiale. Jean me retrouve et m’invite à venir visiter les lieux. Pour le moment, l’endroit est complètement vide et j’en profite pour commencer à questionner mon interlocuteur. Je ressens par contre qu’il vaut mieux ici oublier tout formalisme. Je laisse donc mon ordinateur rangé, engage un entretien semi-directionnel de type discussion de comptoir et inscris mes notes sur mon téléphone. Pas facile à manœuvrer le Jean et pourtant, je m’y emploie comme un diable. Son acolyte Georges nous rejoint au bar. Georges est clown, un peu dans le boulot comme dans la vie. Il a le sourire facile et vient épauler son camarade qui semble de plus en plus lassé par mes questions. – « Bon, c’est la dernière hein ! ». Au final, j’aurais été le seul client de la soirée et je ne sais pas ce que je tirerai de nos échanges. Mais une chose est sûre : la bière était bonne et la compagnie aussi. Un peu avant 20h, je décide de rejoindre la côte vers Arromanches-les-Bains. Au loin subsistent les vestiges d’un port construit par les Alliés après le débarquement. Un lieu chargé d’histoire. Alors que les derniers rayons du soleil viennent lécher les ruines dans la mer, je frissonne.
Aurel et les russes blancs
Parmi les adaptations du parcours, celle qui me conduit à Granville ce matin me donne la banane. Je rejoins Aurel, un des mes anciens collègues. La première fois que j’ai vu Aurel, c’était sur la Réserve Naturelle Régionale du Val-Suzon et il portait un string rouge. Cela dit, moi aussi. Tout comme une bonne partie de l’équipe d’ailleurs, réunie ce matin-là pour une opération de communication baptisée « Tous à poil pour la Nature et face au changement climatique ». Bon, on n’avait pas osé aller jusqu’au bout ; d’où le string rouge. Plus tard, enfermés chacun dans nos appartements, nous avions, comme beaucoup à cette période, fait profiter la Terre entière de nos talents d’artistes. D’Oldelaf à Johnny, nos textes revisités auront, à défaut d’un succès planétaire, posé un sourire sur le visage de nos collègues confinés. Depuis les hauteurs de Granville où je suis arrivé en milieu de journée, Aurel pointe pour moi l’archipel de Chausey qui compte selon le dicton local « autant d’ilots qu’il y a de jours dans l’année ». Ça rappelle le Mont-Saint-Michel et les grandes marées « qui montent à la vitesse d’un cheval au galop ». Des champions de la métaphore !
« Careful Man, There's A Beverage Here! » (The Dude / The Big Lebowski)
Plus tard dans la soirée, nous nous rendons à l’Antirouille Party, une fête de soutien à l’association du même nom. Sur la scène improvisée au Roc des curiosités, le chanteur de Whisky Terror Blues, penché sur son pupitre, éructe de sa voix rauque des paroles sûrement dédiées à Dionysos ou Bacchus : - « Eau de vie / Ode au vin / Fais-moi souverain ». Apparemment, c’est leur premier concert. Un peu avant minuit, nous décidons de rejoindre le bar fétiche d’Aurel, La Rafale, pour la fin de soirée. A défaut de lui faire découvrir The Big Lebowski des frères Cohen, j’invite Aurel à tester la boisson favorite du personnage joué par Jeff Bridges : le russe blanc. Le crémeux du cocktail, ou plutôt la dose de vodka, délie nos langues et quand vient l’heure de quitter la terrasse, nous titubons pas mal. Le lendemain, le temps est beau et je profite de cette clémence pour me baigner une dernière fois dans les eaux de la Manche. Après avoir quitté Aurel et Aude, virevoltant avec leur aile de parapente dans le vent montant de la fin d’après-midi, je rejoindrai un spot avec une vue extraordinaire sur le Mont-Saint-Michel. Ma dernière nuit dans l’ouest. Peu importe, je suis prêt à rentrer.
Julien et les moutons
« Les histoires d’amour finissent mal / En général » (Les Rita Mitsouko)
Avant de rejoindre Julien dans le Berry, je fais une halte par le Château de Chenonceau. Depuis le van, garé en bord du Cher, je distingue, illuminée, la grande galerie construite sous Catherine de Médicis. Sa visite le lendemain me fait découvrir un sacré personnage. Jean-Pierre est dans le même train de touristes que moi et nous parcourons les différentes pièces souvent l’un à côté de l’autre. Dans la cuisine, il fait l’éloge des anciens qui savaient cuisiner sans chichis : - « T’as pas connu ça toi gamin ! ». Bah toi non plus vieux ! Pour lui comme pour moi, cinq siècles nous séparent des « anciens ». Dans la chambre de Diane de Poitiers, Jean-Pierre reste pensif devant un tableau représentant la favorite d’Henri II : - « Ah tiens, Diane ! Bah elle était pas belle… ». Sans ce personnage haut en couleurs, la visite n’aurait certainement pas eu le même charme. Arrivé à Saint-Amand-Montrond, Julien vient à ma rencontre. Je lui montre mon van, il me montre le sien ; un truc de mec. La dernière fois que je l’ai vu, nous trinquions à la soirée des terroirs au congrès des réserves naturelles. Deux ans déjà. Comme Jérémy, Julien a quitté les réserves naturelles pour l’agriculture. Et, le soir, après l’excellent repas partagé avec Mélanie sa compagne et une amie, nous reparlerons beaucoup du contexte de son départ. Les séparations, dans le travail comme en amour, ne se passent jamais bien.
« Et si le blé m'file du bonheur, je ferais p'têt' agriculteur » (Ridan)
Aujourd’hui reconverti dans l’éco-pâturage, Julien m’invite le lendemain matin à l’accompagner pour faire le tour de ses cheptels les plus proches. Les premières brebis, des Solognotes, se portent bien. Mais un arbre tombé par la municipalité pour sécuriser la route attenante a défoncé la clôture. Et puis, il va falloir déplacer les animaux pour laisser les bucherons accéder à l’autre partie du bois. Dans sa tête, Julien additionne le temps que lui prendra ces tâches, un peu dépité. A peine garé devant le pré où il a installé deux de ses béliers, mon compagnon blanchit instantanément. Habituellement inséparables, il n’en distingue qu’un seul et ce n’est pas bon signe. Aussitôt rentré dans la pâture, nous comprenons pourquoi. Son acolyte, la tête baissée et titubant, est à deux doigts de mourir. La raison : sa peau, depuis son arrière train jusqu’à la tête, est infestée de vers. Depuis quelques jours, le temps est en effet particulièrement humide et ce fléau atteint tous les éleveurs. Julien se blâme ; il tient énormément à ses animaux et ne supporte pas de les voir souffrir. Attrapé puis emmené dans le fourgon, il sera rapidement tondu puis soigné. Quand je prends des nouvelles le soir-même, le mouton est toujours en vie et Julien a bon espoir de le sauver. Que ce métier semble éprouvant !
La Carrosserie Mesnier
« Don't worry Shakespeare, you'll get your ending. Once the Duke gets his end-in. » (Nini Legs in the Air / Moulin Rouge)
Je profite de mon passage à Saint-Amand-Montrond pour aller à la découverte de la Carrosserie Mesnier, un théâtre populaire, principalement axé autour du clown mais pas que. La Carrosserie ne figurait pas sur mon itinéraire, tout comme la Ferme Culturelle du Bessin, et je ne sais absolument pas à quoi m’attendre. A mon arrivée, la grande porte rouge du théâtre est ouverte. Un camion de travaux bloque quasiment l’entrée. Je me faufile et arrive sur une cour, en partie en chantier. Un peu derrière moi, une porte de ce qui semble être l’entrée des bureaux. Je toque, rentre et on m’indique le bureau de Solenne, la directrice du lieu, avec qui j’ai rendez-vous. Comme dans tous les lieux que j’ai visités, l’accueil est ouvert et agréable. Nous décidons de commencer par la visite des locaux : espace de résidence, cour, bar associatif puis les bureaux. Les travaux que j’entendais en arrivant sont destinés à restaurer une seconde pièce, jusque-là utilisée pour le stockage, afin d’en faire un second espace de résidence. De retour dans les bureaux, nous déroulons ma grille d’entretien. Solenne a un peu de temps et j’en profite. Alors que je pensais que le théâtre était un peu en dehors des clous de l’étude, il n’en est rien. Mieux, l’histoire est une réussite indéniable susceptible d’inspirer bien d’autres tiers-lieux culturels. D’ailleurs, l’association prévoit, dans les prochains mois d’adhérer à l’association France Tiers Lieux. Au moment de partir, je me rends compte que j’aurais pu aisément passer à côté de la Carrosserie Mesnier. Je garde en tête de garder mes portes les plus ouvertes possibles car l’inspiration ne vient pas nécessairement d’où l’on pense.
Café de la Poèterie
« Mais c’est de l’art ! Gros lard. » (Woody / Toy Story)
Contrairement à la Carrosserie, que j’ai visité la veille, le Café de la Poèterie fait partie des lieux que j’avais sélectionné avant de démarrer mon voyage. Alors qu’il était prévu que je rencontre Thomas, seul salarié de l’association, il n’est malheureusement plus disponible. Un mal pour un bien certainement car Laurène, vers qui Thomas m’a adressé, est vraiment très sympa et les connexions entre nos projets respectifs sont nombreuses. Le lieu est une ancienne usine de briques, située à Saint-Sauveur, dans la Puisaye. Sur le parking devant l’énorme bâtiment, deux énormes cheminées en brique témoignent du passé industriel qui a agité le lieu pendant une bonne dizaine d’années. Un peu partout de l’autre côté, des sculptures, en métal principalement, rappellent que nous sommes dans un village d’artistes. Au centre, à côté d’un ancien wagon servant aujourd’hui de loges pour les artistes, trône le café associatif. Laurène ayant une réunion de dernière minute, elle me propose de faire l’entretien chez elle en début d’après-midi. Je profite donc de ma matinée pour travailler. Le chien du propriétaire, Vincent, pousse sa baballe devant moi et me fixe des yeux, implorant. Au départ, je résiste. Mais on ne peut rien refuser à ces yeux là et profite d’une pause pour le faire courir. Arrive Hugo, en résidence artistique au village. Les yeux souriants, on croise nos projets, notre quotidien, ce qui nous anime dans la vie. Lui c’est, en tout cas en ce moment, le combat de machines à laver. L’Art recouvre directement toutes les formes ! Nous continuerons finalement cette conversation chez Laurène qui nous a tous invités à manger. J’y croiserai d’ailleurs Julie, dont l’activité associative entre beaucoup en résonance avec mes projets futurs. De façon générale, alors que je me trouve dans un bassin de vie peu peuplé et relativement pauvre, je suis agréablement surpris de la dynamique de la région et me promets d’y revenir rapidement. D’autant plus que, d’après Laurène, La Puisaye semble être un lieu de rencontres… Il y a des choix plus difficiles à faire que d’autres.
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